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Notre conception du syndicalisme
Extrait du livre "qu'est ce que Force Ouvrière?" par Jean-Claude Mailly, secrétaire général de la CGT-FO
publié aux éditions "L'Archipel"


Qu’est-ce qu’un syndicat ?

Qu’est-ce que le syndicalisme ?

Le syndicalisme est né au XIXe siècle, de la prise de conscience par les salariés de leurs conditions de vie difficiles et précaires (dureté des conditions de travail, faible salaire, absence de protection sociale, etc.) et de leur incapacité à changer individuellement le cours des choses. C’est une façon, à travers l’union, de refuser la domination des employeurs.

Dénonçant leur situation d’exploités, les salariés s’émancipèrent en créant les premières structures collectives à travers les « sociétés fraternelles » et les sociétés de secours mutuel. Ils contournaient ainsi l’interdiction de coalition découlant de la loi Le Chape lier datant de la Révolution.

 

À partir de 1884, grâce à la loi Waldeck-Rousseau, ils purent créer des syndicats sans être considérés comme hors la loi.

 

Depuis, les salariés n’ont cessé de s’unir dans des syndicats pour défendre leurs intérêts moraux et matériels : aujourd’hui existent, sur le territoire, 15 000 sections syndicales et syndicats Force ouvrière. Créer un syndicat FO permet de regrouper, non seulement les salariés d’une même entreprise, mais ceux d’une même branche professionnelle dans une fédération nationale.

 

Cela permet également l’expression interprofessionnelle au niveau départemental et national.

Pour toutes les questions et revendications de portée générale, ils sont unis au sein de la confédération Force ouvrière. Ainsi, ils tournent le dos délibérément au syndicalisme étriqué et corporatiste des syndicats autonomes.

 

À Force ouvrière, nous considérons que « la revendication est le moteur de l’Histoire », c’est-à-dire un facteur de progrès social. C’est en partant du désir du plus faible que nous ferons favorablement évoluer la société.

 

Aussi veillons-nous particulièrement à ce que la revendication soit librement et démocratiquement déterminée dans toutes les instances syndicales.

 

En résumé, pour Force ouvrière, le syndicat, c’est le moyen de solidariser les salariés et d’avoir un outil revendicatif permettant de déboucher sur des négociations et des accords avec les employeurs, qu’ils soient du secteur public ou du secteur privé.

 

Le syndicalisme est une forme d’action collective.

Est-il la meilleure, la plus efficace ?

Rapporté à son sujet (la défense des intérêts matériels et moraux des salariés), oui, le syndicalisme libre et indépendant est la meilleure forme d’action collective.

Je dis « libre et indépendant » car c’est la condition de sa crédibilité et de son efficacité.

Il doit être indépendant du patronat évidemment, quand celui-ci cherche à s’attacher les représentants syndicaux avec le chèque syndical par exemple, et indépendant également des partis, des groupements ou des rassemblements politiques, qu’ils soient au pouvoir ou dans l’opposition. Le syndicat ne peut pas être la courroie de transmission d’un parti, sinon il subordonnerait son action à une démarche de conquête ou de conservation du pouvoir. Cela reviendrait à faire passer l’expression syndicale après les intérêts politiques immédiats et à s’associer à la réussite ou à l’échec d’un gouvernement qui, lui, a pour objectif de gérer l’intérêt général.

 

Pour être « un syndicat indépendant », il faut que le syndicat le soit tout autant. Ce qui veut dire qu’il doit pouvoir se déterminer seul sur les questions concernant la défense des salariés. Cela signifie aussi qu’il doit se donner les moyens de fonctionner par lui-même en ayant ses propres ressources essentiellement tirées des cotisations de ses adhérents. Sur la base de ces éléments fondamentaux, le syndicat peut alors construire son efficacité qui repose grandement sur l’écoute des salariés, et plus particulièrement des salariés syndiqués, consultés démocratiquement dans les instances syndicales.

 

Le recours à la négociation – qui nous semble aujourd’hui aller de soi et qui permet de contracter entre représentants des employeurs et représentants des salariés – n’était pas la norme il y a encore soixante ans. La norme souhaitée par les employeurs, c’était celle du contrat de travail individuel. Pour bénéficier du contrat collectif qui oblige l’employeur à traiter tous les salariés de la même manière, il a fallu que Force ouvrière lance la grève générale du 25 novembre 1949, grève qui déboucha sur l’adoption de la loi du 11 février 1950 sur les conventions collectives. Actuellement, 300 textes nationaux sont en vigueur.

 

Forte de son indépendance et en possession de revendications librement décidées, l’organisation syndicale est alors en capacité de faire ouvrir des négociations sur les conditions de travail, les salaires, le temps de travail, etc. Historiquement et pratiquement, le syndicalisme a donc démontré son efficacité.

 

Le syndicalisme doit-il être une structure

de lutte, de résistance, de cogestion ?

Je n’oppose pas « lutter » et « résister ». Aujourd’hui, compte tenu des circonstances, nous luttons pour résister à la pression patronale qui remet en cause les acquis difficilement obtenus, pour résister à l’arbitraire ainsi qu’aux pouvoirs publics qui privilégient l’économique plutôt que le social, etc. Quant à la cogestion, nous estimons qu’elle intègre le syndicat dans des rouages décisionnels, remettant ainsi en cause l’indépendance syndicale.

 

Or, les intérêts des salariés et des employeurs, qu’on le veuille ou non, ne sont pas les mêmes. Pour ces derniers, l’objectif est de produire le plus possible au coût le plus bas possible. Pour les salariés, la démarche est au contraire d’obtenir la contrepartie (salaire) la plus importante possible pour leur travail. Il s’agit, en fait, de la répartition des richesses produites. Avec l’État employeur, c’est la même chose : le syndicat agit pour la défense des salariés de l’État.

 

Avec l’État législateur, il s’agit de faire prendre en compte les intérêts de l’ensemble des salariés dans les lois et règlements. Le syndicalisme ne prétend pas, au niveau parlementaire, « faire la loi », ne serait-ce que pour se réserver le droit de la contester. Il exerce librement une pression salutaire afin que la loi soit la plus favorable possible aux travailleurs dans les domaines économiques et sociaux.

 

Nous ne souhaitons pas la cogestion mais la négociation avec les employeurs, ce qui permet de garantir le devenir des salaires et stabilise l’entreprise. Toutefois, nous sommes partisans du paritarisme pour gérer le salaire différé (cotisations sociales) destiné au financement de la Sécurité sociale, de l’assurance chômage, des retraites, de la formation professionnelle.

Parce que c’est une partie de salaire, il est en effet normal que nous exercions un contrôle sur son utilisation à parité avec les représentants des employeurs, d’où le terme de paritarisme. Il ne s’agit pas de cogestion au sens politique, mais de l’exercice d’une responsabilité qui découle de la négociation conventionnelle.

Nous sommes également favorables au paritarisme dans les conseils prud’homaux.

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